2 800 livres sont arrivés en mars 2014 à Mayotte pour créer des bibliothèques jeunesse dans des écoles maternelles et élémentaires.

Biblionef a mis en œuvre ce projet en lien avec l’AMOPA (Association des Membres de l’Ordre des Palmes Académiques) et avec le soutien financier de la Fondation SNCF. L’AMOPA, composée en majorité d’enseignants et de cadres du ministère de l’Éducation nationale, développe des opérations de promotion de la lecture sur l’île aux parfums.

Après 40 jours de bateau, les livres ont été réceptionnés et dédouanés par l’AMOPA. Les cartons ont été stockés dans un contenair dans un établissement scolaire avant d’être distribués dans des écoles choisies en lien avec le Vice-recteur de Mayotte et les inspecteurs de l’Éducation nationale. Les quartiers bénéficiant du dispositif ECLAIR ont été privilégiés, c’est-à-dire les zones déclarées d’éducation prioritaire au regard des difficultés sociales des familles.

A Mayotte, selon une étude récente de l’Insee, le taux d’illettrisme s’élève à 33 %, un niveau supérieur à La Réunion (23 %) et à la France métropolitaine (7 %). 44 % des 16-24 ans ayant été scolarisés ne maîtrisent pas les compétences de base en lecture, écriture, calcul, en langue française. L’illettrisme touche aussi 36 % des élèves en cours de scolarité. Plus de 60% des élèves entrant au collège ne maîtrisent ni la langue ni la lecture après parfois 5 ans passés au primaire.La situation sociale et l’illettrisme des parents jouent un rôle important mais également la langue parlée durant l’enfance. Seuls 15 % des Mahorais ayant été scolarisés parlaient français à la maison durant leur enfance. Ces personnes sont moins souvent en difficulté à l’écrit que celles qui parlaient uniquement le shimaore ou le comorien.

31% de la population de l’île a entre 0 et 9 ans soit 65 000 enfants. Jusqu’en 2008, on ne comptait aucune école maternelle et les enfants connaissaient de grandes difficultés à l’entrée au cours préparatoire. Vivant pour la plupart dans un environnement culturel très limité, avec des parents souvent analphabètes, la grande majorité des enfants n’avait jamais rencontré la langue française ni à l’écrit ni à l’oral. Le territoire compte aujourd’hui 65 écoles maternelles mais l’usage du livre est encore trop peu développé auprès de la petite enfance. Très peu d’établissements ont une bibliothèque scolaire car l’espace fait défaut ; il est à noter qu’à ce jour 400 salles de classe manquent ce qui oblige les établissements à une rotation pour recevoir l’ensemble des élèves.

Les enfants n’ont pas de matériel personnel (sac d’école, stylo et cahiers) et dans certaines écoles, il y a même une absence d’ouvrages scolaires. Par ailleurs, l’album jeunesse est rarement présent dans les habitations familiales car la priorité est donnée à l’achat de nourriture, au logement et au transport. Faire découvrir la lecture aux plus jeunes est pourtant une chance pour le développement de leur personnalité car, sans livres qui les séduisent et les stimulent, leur éducation et leur capacité d’éveil sont compromis.

La dotation Biblionef a bénéficié aux écoles maternelles et primaires de Cavani sud, de Koungou, d’Hajangua, de Labattoir, de Bonovo, de Sada, de Cavani Stade, de Kaweni ainsi qu’à la Bibliothèque Départementale de Prêt (BDP) de Mamoudzou. Chaque structure a reçu plus de 200 livres pour créer des petites bibliothèques scolaires, très demandées et utiles pour les professeurs comme pour les élèves. Les 3 000 enfants scolarisés dans ces établissements et les milliers d’inscrits de la BDP ont découvert ces beaux ouvrages avec émerveillement.

Dans les écoles, grâce à ces dotations, les enseignants prennent conscience de la nécessité d’offrir à leurs élèves un « projet de lecteur » pour les aider à entrer dans l’apprentissage de la lecture. Les écoles maternelles de Kaweni, Hajangua et Cavani ont été privilégiées dans les distributions car la demande émanait directement des directeurs d’établissements souhaitant proposer une bibliothèque et faire découvrir la lecture plaisir à leurs élèves. Un conseiller pédagogique a été désigné pour dynamiser les projets de bibliothèques dans ces écoles.

La Bibliothèque Départementale de Prêt de Mamoudzou, faute de ligne budgétaire dédiée par le Conseil général, n’avait pas pu faire l’acquisition d’ouvrages depuis 5 ans alors qu’elle propose des visites à des classes et organise régulièrement des animations.

Les structures bénéficiaires de la dotation souhaitent l’inscription dans leur plan de formation d’un stage à l’utilisation de l’album jeunesse en classe en direction du public enseignant. Sur 2 000 enseignants du primaire près de 400 n’ont reçu aucune formation à l’enseignement et encore moins à la lecture de l’album jeunesse. Le dispositif « maître en plus », expérimenté cette année pour les enfants en difficulté et généralisé à la rentrée 2014, va aussi permettre de créer la rencontre entre les enfants et le livre.

En avril, la bibliothèque de l’école maternelle Kaweni a été inaugurée officiellement en présence des autorités académiques.

Quelques témoignages :

« Sur l’île de Mayotte, les livres étant pratiquement inexistants dans les écoles, vous nous faites parvenir une source intarissable pour l’ouverture culturelle et intellectuelle. Peu d’enfants ici ont accès au livre. C’est un réel bonheur pour eux de pouvoir en toucher un, de pouvoir échanger leurs impressions. Je vous remercie pour cette dotation, précieuse pour aider nos jeunes élèves à comprendre le monde »

Nathalie Chapon Cunisse, Directrice de l’école élémentaire Baobab à Koungou

 

« Notre école vient de recevoir un lot d’albums conséquent qui vient enrichir la bibliothèque de l’école, jusqu’ici bien pauvre. Je tiens à saluer cette initiative louable qui contribue à l’éducation des enfants de cette île. Nous vous remercions de nous aider à offrir à nos enfants de maternelle un accès au livre et ainsi à lutter contre l’illettrisme.»

Brahim Daghor, Directeur de l’école maternelle Cavani Sud